Amrit, ou encore Amrith, en arabe : عمريت (Marathos en grec ancien), est un site archéologique phénicien qui se trouve sur la côte, face à l'ancienne cité d'Arouad (ou Arwad), qui occupait une ile et se situait à 5 km environ au sud de Tartous en Syrie. Le temple de Melqart disposait d'un bassin alimenté par une source, des nécropoles ont été implantées alentour. Les restes d'un stade remontant à l'époque phénicienne ont également été identifiés.
Découverte et fouilles
- En 1860 et 1861, l'archéologie Ernest Renan entreprit des fouilles au sein de la cité antique d'Amrit, mettant ainsi au jour un sanctuaire religieux, un village antique et également une nécropole.
- Dans les années 1950 — 1954 et 1955 — , ainsi qu'en 1965, une deuxième et troisième campagnes de fouilles révélèrent l'ensemble de l'aire couverte par le site antique phénicien. De ces mises en lumière, les spécialistes obtinrent une vue d'ensemble et une perspective relativement correctes et purent ainsi établir les plans au sol des vestiges d'Amrit.
- Les fouilles effectuées en 2003, furent marquées par la découverte d'une galerie et d'un arc monumentaux édifiés par le biais d'une percée à même d'un surplomb rocheux et situés en face de stèles funéraires appartenant à la nécropole royale. Ces vestiges monumentaux syriens sont assignables au IIe siècle.
- Plus récemment, en 2005, une quatrième série de fouilles permit de mettre au jour un tombeau que l'on peut attribuer à l'époque hellénistique.
- Enfin, en 2010, les dernières fouilles opérées sur le complexe antique urbanistico-religieux sous la direction de Michel Al-Maqdissi, mettent en évidence différents points ayant trait au site d'Amrit, lesquels demeuraient jusqu'alors approximatifs et flous. Notamment, l'analyse du tell sur lequel repose une partie des vestiges archéologiques, fournit une approche globale et détaillée des différentes étapes de l'histoire du site antique.
Le Tell d'Amrit
Le tell — c'est-à-dire, une formation en monticule induit par la superposition de plusieurs strates architecturales d'époques différentes —, est localisé à l'est du sanctuaire appartenant au site d'Amrit. Grossièrement, il se présente sous la forme d'un carré de 110 mètres de côté. Le promontoire artificiel est l'objet d'une analyse stratigraphique poussée au moyen d'une tranchée obtenue par une technique d'excavation circonscrite directement au sein du tell. L'équipe archéologique, sous la houlette de Michel Al-Maqdissi — actuel Directeur de la Recherche et des Fouilles de la République Arabe de Syrie —, met en lumière de nombreuses découvertes essentielles à la compréhension de l'histoire et des caractéristiques architecturales du complexe antique d'Amrit. Dans une moindre mesure, le Directeur de l'Archéologie Syrienne nous éclaire également sur l'origine de la forme carrée de la butte artificiel. En faisant appel à une méthodologie par étude comparative, il démontre que cette dernière serait à imputer à une culture de typologie amorite.
Il est attesté que le site phénicien n'a jamais subi de développement urbanistique. Les analyses stratigraphiques démontrent également qu'Amrit n'a été l'objet d'aucune sorte de processus d'hellénisation.
Dans un second temps, on peut mettre en évidence que le tell, lequel est pourvu de 9 strates distinctes, recouvre neuf périodes chronologiques différentes. Incidemment, le tell représentant un témoin, voire un échantillon du site d'Amrit, on peut en conclure que ce dernier est gradué de neuf époques s'étalant sur une vaste amplitude chronologique.
Périodes chronologiques du site
Factuellement, la mise au jour du tell et l'étude des différentes couches chronologiques, permet d'appréhender une datation approximative — mais scientifiquement attestée — de la fondation du complexe antique jusqu'à son abandon.
- Le début du IIIe millénaire av. J.-C. marque les premières attestations de présence humaine.
- La deuxième phase chronologique s'échelonne de -2600 à -2500; elle survient au cours du processus dit de deuxième révolution urbaine. Les nombreuses céramiques retrouvées in situ du tell fournissent un indice concret venant étayer ce postulat.
- La troisième période chronologique recensée est assignable au début du IIe millénaire av. J.-C.. Cette dernière correspondrait à l'occupation de l'aire du site et de ses alentours, par une dynastie amorite. Les vestiges mis au jour de constructions murales ouvragées au moyen de roches taillées, mais également de tombes s'élevant sous forme de cylindre, témoignent de cette occupation. En outre, la découverte de diverses reliques appartenant à la même époque, viennent renchérir les édifications architecturales ajourées: des haches caractérisées par leur ouvertures travaillées au sein de la lame; des céramiques à boire cannelés particularisées par une couche externe façonnée de métal, ou encore des cruches ovales lissées et pourvues d'un aspect brillant.
- Aux environs de -1500 / -1200, on observe une extension du village d'Amrit. Les nombreux vestiges d'habitats dotés de surface en terre battue, couplés à la présence de poteries autochtones, lesquelles se présentent de manière épurée, lissée et alternant une stylistique figurative à une stylistique de pigmentation. Cette ère chronologique est à attribuer à la prééminence cananéenne au sein de la région dans laquelle Amrit s'inscrit.
- La cinquième phase a pour occurrence les environs de 1175 av. J.-C. Cette période se matérialise par une strate composée d'éléments charbonneux et relativement mince. D'après Michel Al-Maqdissi — lequel a procédé à l'identification et l'analyse de celle-ci — , elle serait à mettre en corrélation avec une série d'invasions imputables aux populations méridionales originaires du territoire proche-oriental de l'Amourrou — c'est-à-dire une région localisée à la frontière des actuels Liban et Syrie —. Factuellement, ces peuples sont très probablement à l'origine de destruction massive de sites phéniciens littoraux, dont celui d'Amrit.
- La sixième prend place à la conclusion du IIe millénaire av. J.-C. et au commencement du Ier millénaire av. J.-C.. Celle-ci se distingue par une émancipation géopolitique des comptoirs phéniciens de côte nord-syrienne. Cette modification régionale se concrétise par la présence de maints sites d'extraction pierreuse d'origine calcaire, lesquels possèdent la particularité d'être ajourés — à noter que lesdites pierres extraites sont également appelées ramleh —. Cette observation illustrerait ainsi un processus dynamique d'édification, d'œuvrement et, par ailleurs de stabilité territoriale.
- Au cours du Second Âge du fer proche-oriental — aux alentours du viie siècle av. J.-C. et du vie siècle av. J.-C. — le site côtier d'Amrit voit s'épanouir une grande activité religieuse, que l'on peut remarquer par le biais de nombreuses ruines d'édifications votives retrouvées in situ du tell et se répartissant également sur l'ensemble du complexe archéologique. Le complexe architectural phénicien devient, à partir de cette époque, un lieu de pèlerinage majeur dont le rayonnement s'étend sur la globalité du littoral Nord-Est méditerranéen. En outre, on peut observer un nouveau dynamisme d'extension du village, quand bien même celui-ci demeure manifestement de typologie proto-urbaine.
Les sites et structures funéraires d'Amrit
L'emplacement des nécropole: une configuration spatiale originale
À la périphérie du site d'Amrit des nécropoles de grande tailles forment, associées aux zones d'extraction des ramleh, une sorte de croissant entourant l'aire médiane occupée par le tell et le sanctuaire dédié à Melqart. On peut établir un parallèle entre cette configuration géographique spécifique au site littoral nord-syrien, et celle tout aussi unique du site beaucoup plus méridional de Sidon. Ce dernier apparaît le seul dont le plan quartier par quartier soit similaire.
Une grande variété des origines ethniques et géographiques des défunts
- Après examen par recoupement et études archéologiques, on a attesté que ces nécropoles abritent les restes de défunts originaires de l'Île d'Arados — petite terre baignant dans la mer Méditerranée et située en face de la côte d'installation d'Amrit. En outre, on émet l'hypothèse que les vastes complexes funéraires accueilleraient en leur sein les ossements de pèlerins vouant un culte au dieu Melkart.
- Par ailleurs, les fouilles entreprise sous la direction de Michel Al-Maqdissi in situ des stèles funéraires localisées dans les différentes enceintes mortuaires, ont permis de mettre au jour plusieurs types de mobilier funéraires. De facto, les artéfacts et les reliques et/ou objets antiques constituants les viatiques se présentent tels des statuts sociaux des défunts. L'analyse, l'énumération et l'identification de biens funéraires, induisent à déterminer des positions hiérarchiques et/ou patrimoniales extrêmement variées.
Une diversité des types de nécropoles
- Au sein de la plupart des complexes mortuaires, les fosses funéraires dévolues à chaque défunt sont ouvragées à partir de la pierre rocheuse propre à Amrit, se présentant alternativement de plain pied au sol ou accompagnées d'un bloc monolithique commémoratif doté d'une stylistique épurée.
- En outre, dans la zone septentrionale du site phénicien, les équipes d'archéologues ont mis au jour une nécropole de typologie hybride, c'est-à-dire que les classiques tombeaux rocheux côtoient des chambres funéraires pourvues d'un sarcophage de forme grossièrement humaine façonné soit en marbre, soit simplement en argile cuit.
- Pour autant, la diversité des types de nécropoles ne se résume pas à ces seuls points notables. On a d'autre part mis au jour des sites funéraires sis dans les aires méridionale et méridio-orientale d'Amrit, distinctes au regard des caractéristiques des tombes les dotant. Au sein de ces zones circonscrites, les fouilles ont notamment révélé ce que l'on peut créditer comme étant une nécropole royale. Celle-ci possède quatre hypogées — autrement dit, des constructions souterraines funéraires œuvrées par excavation et terrassement, lesquelles sont généralement munies d'un couloir d'accès, d'une chambre funéraire et parfois, d'une anti-chambre —. Ces quatre ouvrages funéraires remarquables, également appelées méghazils dans la région du nord-ouest syrien, sont chacun flanqué de quatre sculptures de lion.
- La dernière nécropole chronologiquement recensée — datée de la basse-période phénicienne —, également dénommée Nécropole de Bayada, est localisée dans la partie orientale du site d'Amrit. Plus homogène que les complexes funéraires antérieurs, cette dernière propose un panorama global constitué uniquement de simples monolithes de pierre dressés, surplombant chacun de ses caveaux funéraires.
Une galerie funéraire remarquable
Se plaçant en vis-à-vis de la Nécropole de Bayada, on peut noter la présence d'une butte naturelle. Cette dernière est pourvue de deux hypogées, lesquelles apparaissent, factuellement et de manière inédite, non souterraines mais excavées directement dans ladite butte sous forme d'une double galerie. La galerie, creusée à flanc de roche, se sépare en deux parties distinctes au moyen d'un arc situé juste à l'entrée de l'ouvrage mortuaire. Chacune de ces deux sous-galeries se place exactement dans la ligne médiane formée par le dromos — en archéologie spécialisée à la civilisation phénicienne, ce terme désigne le couloir d'entrée à(aux) chambre(s) funéraire(s).
Dans le rapport de fouilles effectuées en 2003, l'archéologue Michel Al-Maqdissi, nous fournit de plus amples détails concernant la galerie.
- Il observe que l'arc de séparation des deux segments est soutenu par deux colonnes faisant office de soubassements ;
- L'archéologue décrit le premier segment de galerie comme étant dans le prolongement du dromos;
- Ce segment se pourvoit de quatre portées creusées dans les flancs muraux de celui-ci. Un caveau funéraire est incorporé à chacune des portées. Directement posées à terre, et situées au-devant des quatre rangées tombales, on peut remarquer deux statues anthropomorphes façonnées par technique de sculpture dite de ronde-bosse. Ces sculpture ronde-bosselées en buste — debout —, figurent deux personnages l'un féminin et l'autre masculin. On estime qu'elles représenteraient probablement les commanditaires de la construction mortuaire ;
- Le second segment est situé, quant à lui, dans la partie finale de l'excavation terrassée. Il se compose essentiellement d'une riche salle semi-circulaire, dont le centre est occupé par trois sarcophages. Ces derniers, d'excellente facture artisanale, sont assignés au début du IIe siècle — autrement dit, au cours de la période consignant la Syrie à un statut de province romaine —. De facto, on relève que les trois ouvrages funéraires sont façonnés dans un style typique syrio-hellénistique.
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