À petite dose, elle met de bonne humeur et réduit l’angoisse. La molécule de l’alcool a en effet la particularité d’inhiber ou de stimuler un certain nombre de zones du cerveau, libérant de la dopamine, des endorphines ou de la sérotonine. Qui, pourtant, à l’exception de quelques scientifiques, la dénonce comme une drogue capable d’affecter nos 200 milliards de neurones ?
Pas l’industrie de l’alcool, trop attachée à faire fructifier un marché en hausse de 1 300 milliards de dollars annuels. Ni les pouvoirs publics, qui, même s’ils appellent dans certains pays à le consommer avec modération, se réjouissent des taxes que l’alcool fait entrer dans les caisses de l’État, au détriment des coûts de santé à long terme, dix fois supérieurs en Allemagne, par exemple. Pourquoi laisse-t-on périr de ses ravages, chaque année dans le monde, 3 millions de personnes – bien plus que le nombre d’homicides, de morts sur la route et de décès imputables aux drogues illégales réunis ?
Partant d’histoires individuelles (une supportrice anglaise de foot, un journaliste allemand renommé), Andreas Pichler décrypte les mécanismes physiologiques et psychiques induits par la consommation d’alcool, avec l’appui d’experts : neuropsychopharmacologue, chercheurs en addictions ou professeur en psychologie cognitive. Il explore aussi l’influence de nos cultures et des industriels sur nos comportements et ceux des décideurs.
De l'Allemagne à l'Angleterre en passant par l’Afrique, le documentariste met en lumière les pratiques commerciales agressives des grandes marques, en quête permanente de nouveaux marchés, quitte, comme le fait au Nigeria un grand brasseur, à recruter des prostituées pour vanter les mérites aphrodisiaques de sa bière. C’est en Islande, fleuron de l’ivresse traditionnelle, notamment chez les jeunes, qu’il achève sa captivante enquête. Aujourd’hui, les boissons alcoolisées n’y sont plus vendues que dans les magasins d’État, la publicité les concernant est interdite, et, surtout, on propose aux adolescents des alternatives procurant une ivresse naturelle telles que le sport, les activités créatives ou de groupe. Une nouvelle approche sanitaire qui semble encore loin, hélas, de faire école.
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