♦Textes Antiques♦
Corpus Hermeticum - Livre I: POIMANDRES
IV. LE CRATÈRE, OU LA MONADE
Pourquoi donc, ô père, Dieu n'a-t-il pas distribué l'intelligence à tous?
HERMÈS.
Il a voulu, ô mon fils, l'établir au milieu des âmes comme un prix à conquérir.
TAT.
Et où l’a-t-il établie?
HERMÈS.
Il en a rempli un grand cratère et l'a fait porter par un messager, lui ordonnant de crier ceci aux cœurs des hommes : « Baptisez-vous, si vous le pouvez, dans le cratère, vous qui croyez que vous retournerez à celui qui l'a envoyé, vous qui savez pourquoi vous êtes nés. » Et ceux qui répondirent à cet appel et furent baptisés dans l'Intelligence, ceux-là possédèrent la Gnose et devinrent les initiés de l'Intelligence, les hommes parfaits. Ceux qui ne le comprirent pas possèdent la raison, mais non l'intelligence, et ignorent pour quoi et par qui ils ont été formés. Leurs sensations ressemblent à celles des animaux sans raison. Composés uniquement de passions et de désirs, ils n'admirent pas ce qui est digne d'être contemplé, ils se livrent aux plaisirs et aux appétits du corps et croient que c'est là le but de l'homme. Mais ceux qui ont reçu le don de Dieu, ceux-là, ô Tat, à considérer leurs œuvres, sont immortels et non plus mortels. Ils embrassent par l'intelligence ce qui est sur la terre et dans le ciel, et ce qu'il peut y avoir au-dessus du ciel. A la hauteur où ils sont parvenus, ils contemplent le bien, et ce spectacle leur fait considérer comme un malheur leur séjour ici-bas. Dédaignant toutes les choses corporelles et incorporelles, ils aspirent vers l'Un et le Seul. Tel est, ô Tat, la science de l'intelligence : contempler les choses divines et comprendre Dieu. Tel est le bienfait du divin cratère.
Puisqu'il en est ainsi, ô Tat, le bien qui vient de Dieu est à notre disposition, nous n'avons plus qu'à le prendre sans retard. Le mal ne vient pas de Dieu, il vient de nous-mêmes qui le préférons au bien. Tu vois, ô mon fils, combien de corps il nous faut traverser, combien de chœurs de démons et de révolutions d'étoiles pour arriver jusqu'au Dieu seul et un. Le bien est inaccessible, infini et sans bornes; par lui-même il n'a pas de commencement, mais pour nous il semble en avoir un qui est la Gnose. La Gnose n'est pas précisément le principe du bien, mais c'est par elle que nous arrivons à lui. Prenons-la donc pour guide, nous avancerons à travers tous les obstacles.