By Anarkia333 |
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Sources - Textes Antiques

 


Textes Antiques


 

Corpus Hermeticum - Livre IV
FRAGMENTS DES LIVRES D'HERMÈS A AMMON
VI

L'âme est donc, ô Ammon, une essence ayant sa fin en elle-même, recevant à l'origine la vie qui lui est destinée, et attirant à elle, comme une matière, une raison qui a la fougue et le désir. La fougue est une matière ; si elle s'accorde avec la partie intelligente de l'âme, elle devient le courage et ne cède pas à la crainte. Le désir aussi est une matière; associé à la partie raisonnable de l'âme, il devient la tempérance et ne cède pas à la volupté. Car la raison supplée à l'aveuglement du désir. Quand les facultés de l'âme se coordonnent ainsi sous la suprématie de la raison, elles produisent la justice. Le gouvernement des facultés de l'âme appartient à l'essence intelligente qui existe en elle-même dans sa raison prévoyante, qui a pour autorité sa propre raison. Elle gouverne tout comme un magistrat; sa raison prévoyante lui sert de conseiller. La raison de l'essence est la connaissance des raisonnements qui fournissent à l'irrationnel l’image du raisonnement; image obscure relativement au raisonnement, raisonnable par rapport à l'irrationnel, comme l'écho par rapport à la voix, ou l'éclat de la lune par rapport au soleil. La fougue et le désir sont disposés selon une certaine raison, s'attirent réciproquement et établissent en eux une pensée circulaire.
(Stobée, Ecl. phys., LII, 4. — Patrizzi réunit ce fragment au précédent.)

VII
Toute âme est immortelle et toujours en mouvement. Car nous avons dit que les mouvements procèdent soit des énergies, soit des corps. Nous avons dit aussi que l'âme, étant incorporelle, vient, non d'une matière, mais d'une essence incorporelle elle-même. Tout ce qui naît est nécessairement produit par quelque chose. Deux mouvements suivent nécessairement toute chose dont la génération est suivie de corruption : celui de l'âme, qui la fait mouvoir, et celui du corps, qui l'augmente, la diminue, et la décompose en se décomposant lui-même. C'est ainsi que je définis le mouvement des corps corruptibles. Mais l'âme est toujours mobile, sans cesse elle se meut et produit le mouvement. Ainsi toute âme est immortelle et toujours mobile, ayant pour mouvement sa propre actinie. Il y a trois espèces d'âmes : divine, humaine et irrationnelle. L'âme divine appartient à un corps divin, c'est en lui qu'elle a son énergie; elle s'y meut et l'agite. Lorsqu'elle se sépare des êtres mortels, elle abandonne ses parties irrationnelles et entre dans le corps divin, et, comme elle est toujours mobile, elle est emportée dans le mouvement universel. L'âme humaine a aussi quelque chose de divin, mais elle est attachée à des éléments irrationnels, le désir et la fougue ; ces éléments sont immortels, car ce sont des énergies, mais ce sont les énergies des corps mortels; aussi sont-elles éloignées de la partie divine de l'âme, qui est dans le corps divin. Lorsque celle-ci entre dans un corps mortel et y rencontre ces éléments irrationnels, par leur présence elle devient une âme humaine. Celle des animaux se compose de fougue et de désir. Aussi les animaux sont-ils appelés brutes, parce que leur âme est privée de raison. La quatrième espèce d'âmes, celle des êtres inanimés, est placée en dehors des corps qu'elle agite. Elle se meut dans le corps divin, et le meut comme en passant.
(Stobée, Ecl. phys., LII, 5.)

VIII
L'âme est donc une essence éternelle et intelligente, ayant pour pensée sa propre raison. Elle s'associe à la pensée de l'harmonie. Séparée du corps physique, elle persiste par elle-même, elle est indépendante dans le monde idéal. Elle gouverne sa raison, et apporte à l'être qui entre dans la vie un mouvement analogue à sa propre pensée, et qu'on nomme la vie; car le propre de l'âme c'est d'assimiler les autres choses à son caractère. Il y a deux sortes de mouvement vital, l'un selon l'essence de l'âme, l'autre selon la nature du corps. Le premier est général, le second particulier; l'un est indépendant, l'autre soumis à la nécessité. Car tout mobile est soumis à la loi nécessaire du moteur. Mais le mouvement moteur est uni par l'amour à l'essence intelligente. L'âme doit être incorporelle et son essence est étrangère au corps physique; si elle avait un corps, elle n'aurait ni raison ni pensée. Tout corps est inintelligent, mais en recevant l'essence il devient un animal qui respire. Le souffle appartient au corps, la raison contemple la beauté de l'essence. Le souffle sensible discerne les apparences. Il est partagé en sensations organiques, et la vision spirituelle est une partie de lui; de même le souffle acoustique, olfactif, dégustatif, tactile. Ce souffle, attiré par la pensée, discerne les sensations, autrement il ne crée que des fantômes, car il appartient au corps et reçoit tout. La raison de l'essence est le jugement. A la raison appartient la connaissance de ce qui est honorable, au souffle l'opinion. Celle-ci, reçoit son énergie du monde extérieur, celle-là d'elle-même.
(Stobée, Ecl. phys., LII, 6. — Patrizzi réunit ce morceau au précédent.)